Libye : la danse des charognards après la mort de Kadhafi

Publié le par Souaïbou Farougou

Depuis que la mort du Guide libyen, le Colonel Mouammar Kadhafi a été annoncée, l’opinion publique a été conditionnée comme d’habitude par les média occidentaux à accepter cet assassinat que l’OTAN a contribué à orchestrer s’il n'en est  le principal artisan. Très tôt le « monde libre » s’est réjoui de cette  fin brutale. Quelques morceaux choisis :

 
Barack Obama a déclaré que les Libyens « ont désormais une chance de pouvoir déterminer leur propre destin dans une Libye nouvelle et démocratique »

Nicolas Sarkozy : « la disparition de Mouammar Kadhafi est une étape majeure dans la lutte menée depuis plus de huit mois par le peuple libyen pour se libérer du régime dictatorial et violent qui luia été imposé pendant plus de quarante ans »

Alain Juppé, Ministre français des Affaires étrangères : « L'annonce de mort de Kadhafi et la chute de Syrte sont la fin d'une période très difficile pour le peuple libyen. C'est la fin de 42 ans de tyrannie, d'un conflit militaire qui a été très éprouvant pour le peuple libyen ».

Herman Van Rompuy, Président de l'Union européenne, José Manuel Barroso Président de la Commission européenne : « Le décès annoncé de Mouammar Kadhafi marque la fin d'une ère de répression au cours de laquelle le peuple libyen a souffert pendant trop longtemps. Aujourd'hui, la Libye peut tourner une page de son histoire et embrasser un nouvel avenir démocratique »
Marcin Bosacki, porte-parole du ministère polonais des Affaires étrangères : « Le sort du colonel Mouammar Kadhafi constitue un avertissement pour d'autres dictateurs dans la région et dans le monde ». 
 
William Hague, Ministre britannique des Affaires étrangères :  « Nous n'allons pas le pleurer. Des milliers de personnes sont mortes dans ce conflit, et la fin de la bataille pour Syrte et la mort de Kadhafi sont pour les Libyens l'occasion d'aller de l'avant ».
Il n’en fallait pas plus pour que les média occidentaux déclarent que "la communauté internationale" s’est réjoui de la fin de l’ex dirigeant libyen. Quid alors des africains dont les voix n’étaient pas encore entendues ? Pour ces média, elles comptent sûrement pour quantité négligeable. Comme d’habitude après un événement, lorsque le Président américain, le Président Français et le Premier ministre britanique parlent, c’est la "Communauté internationale" qui s’est prononcée.  On a même entendu dire que le dirigeant libyen est le seul responsable du malheur qui lui est arrivé puisqu’il a été hostile à toutes négociations. Or on se rappelle encore les nombreuses initiatives prises par l’Union africaine avec des missions qui se sont rendues à Tripoli et à Benghazi pour tenter une médiation, mais le jeu était déjà fait puisque la décision était prise, sous le couvert de la résolution 1973 votée le jeudi 17 mars par le Conseil de sécurité des Nations Unies, de mettre fin au régime du Président Mouammar Kadhafi. Pourtant le point 4 de cette résolution est libellé en ces termes : le Conseil de sécurité « Autorise les États Membres qui ont adressé au Secrétaire général une notification à cet effet et agissent à titre national ou dans le cadre d’organismes ou d’arrangements régionaux et en coopération avec le Secrétaire général, à prendre toutes mesures nécessaires, nonobstant le paragraphe 9 de la résolution 1970 (2011), pour protéger les populations et les zones civiles menacées d’attaque en Jamahiriya arabe libyenne, y compris Benghazi, tout en excluant le déploiement d’une force d’occupation étrangère sous quelque forme que ce soit et sur n’importe quelle partie du territoire libyen, et prie les États Membres concernés d’informer immédiatement le Secrétaire général des mesures qu’ils auront prises en vertu des pouvoirs qu’ils tirent du présent paragraphe et qui seront immédiatement portées à l’attention du Conseil de sécurité ». Et au nom de la protection des civils libyens, il y a eu plus de 50 000 morts selon les chiffres donnés par le Conseil national de transition. Les pays membres de l’OTAN qui ont dirigé cette guerre dont les objectifs de départ ont été détournés, n’ont déploré aucune perte en vies humainesLes dirigeants du Conseil national de transition qui ont promis la transparence sur les conditions de l'assassinat de Kadhafi refusent aujourd'hui de pratiquer l'autopsie sur son corps. Que veut-on cacher? A-t-on peur d'être aussi rangé au ban des criminels de guerre,menace proférée récemment par Amnisty International ?  Ceux qui se réjouissent aujourd'hui de la mort de Kadhafi doivent savoir que le Capitole n'est pas loin de la Roche tarpéienne
Déjà on parle de comment se partager le butin sur les cadavres des libyens. Les hommes d’affaires français se préparent à aller pour la seconde fois en Libye pour parler de contrats. Le marché de reconstruction est alléchant et nul ne veut se faire doubler. Après avoir bombardé, détruit au maximum les infrastructures des villes libyennes, il faut maintenant reconstruire. Les économies occidentales engluées dans une crise profonde ont trouvé sur les cadavres des libyens un souffle nouveau.  .

En ce qui concerne les africains, avec la disparition du guide libyen, c’est le rêve des Etats Unis d’Afrique qui vole en éclats. Un esprit de discernement s’impose pour ne pas toujours consommer à l’état brut toutes les informations venant des pays développés, car elles sont d’abord fondées sur leurs propres intérêts. La Libye est aujourd’hui dans une zone d’incertitude, du moment où nul ne peut prédire le sort qui lui sera réservé dans les mois à venir. Tous les peuples veulent la liberté, mais ils doivent la conquérir eux-mêmes pour se construire un destin solide. L’Afrique doit à jamais se débarrasser de l’hypocrisie occidentale intéressée et poursuivre inlassablement sa lutte pour l’unité. C’est à ce prix que les africains honorerons la mémoire de grands dirigeants comme Nkrumah, Lumumba, Sankara et…Kadhafi.
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